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Des contes et légendes
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22 janvier 2007

La Belle aux Cheveux d'Or (suite)

Le roi trouva qu'effectivement il n'avait point tort ; il regarda de travers ceux qui lui avaient dit du mal de son favori, et il l'emmena chez lui se repentant bien de la peine qu'il lui avait faite.
Après l'avoir fait souper à merveille, il l'appela dans son cabinet, et lui dit : "Avenant, j'aime toujours la Belle aux Cheveux d'Or, se refus ne m'ont point rebuté ; mais je ne sais comment m'y prendre pour qu'elle veuille bien m'épouser : j'ai envie de t'y envoyer pour voir si tu pourras réussir."
Avenant répliqua qu'il était disposé à lui obéir en toutes chose, qu'il partirait dès le lendemain.
"Oh ! dit le roi, je veux te donner un grand équipage.
- Cela n'est point nécessair, répondit-il ; il ne me faut qu'un bon cheval, avec des lettres de votre part."
Le roi l'embrassa, car il était ravi de le voir sitôt prêt.
Ce fut un lundi matin qu'il prit congé du roi et de ses amis, pour aller à son ambassade tout seul, sans pompe et sans bruit. Il ne faisait que rêver aux moyens d'engager la Belle aux Cheveux d'Or à épouser le roi. Il avait une écritoire dans sa poche, et, quand il lui venait quelque belle pensée à mettre dans sa harangue, il descendait de cheval et s'asseyait sous des arbres pour écrire, afin de ne rien oublier. Un matin qu'il était parti à la petite pointe du jour, en passant dans une grande prairie, il lui vint une pensée fort jolie ; il mit pied à terre, et se plaça contre des saules et des peupliers qui étaient plantés le long d'une petite rivière qui coulait au bord du pré. Après qu'il eut écrit, il regarda de tous côtés, charmé de se trouver en un si bel endroit. Il aperçut sur l'herbe une grosse carpe dorée qui baîllait et qui n'en pouvait plus, car, ayant voulu attraper de petits moucherons, elle avait sauté si hors de l'eau, qu'elle s'était élancée sur l'herbe, où elle était près de mourir. Avenant en eut pitié ; et, quoiqu'il fût jour maigre et qu'il eût pu l'emporter pour son dîner, il fut la prendre et la remit doucement dans la rivière. Dès que ma commère carpe sent la fraîcheur de l'eau, elle commence à se réjouir, et se laisse couler au fond ; puis revenant toute gaillarde au bord de la rivière : "Avenant, dit-elle, je vous remercie du plaisir que vous venez de me faire ; sans doute je serais morte, et vous m'avez sauvée ; je vous le revaudrai." Après ce petit compliment, elle s'enfonça dans l'eau ; et Avenant demeura bien surpris de l'esprit et de la grande civilité de la carpe.
Un autre jour qu'il continuait son voyage, il vit un corbeau bien embarrassé : ce pauvre oiseau était poursuivi par un gros aigle (grand mangeur de corbeau) : il était près de l'attraper, et il l'aurait avalé comme une lentille, si Avenant n'eût eu compassion du malheur de cet oiseau. "Voilà, dit-il, comme les plus forts oppriment les plus faibles : quelle raison à l'aigle de manger le corbeau ?" Il prend son arc qu'il portait toujours, et une flèche ; puis, mirant bien l'aigle, croc ! il lui décoche la flèche dans le corps et le perce de part en part ; il tombe mort, et le corbeau, ravi, vint se percher sur un arbre. "Avenant, lui dit-il, vous êtes bien généreux de m'avoir secouru, moi qui ne suis qu'un misérable corbeau ; mais je ne demeurerai point un ingrat, je vous le revaudrai."
Avenant admira le bon esprit du corbeau et continua son chemin. En entrant dans un grand bois, si matin qu'il ne voyait qu'à peine à se conduire, il entendit un hibou qui criait en hibou désespéré. "Ouais ! dit-il, voilà un hibou bien affligé ; il pourrait s'être laissé prendre dans quelque filet." Il chercha de tous côtés, et enfin il trouva de grands filets que des oiseleurs avaient tendus la nuit pour attraper les oisillons. "Quelle pitié ! dit-il ; les hommes ne sont faits que pour s'entre-tourmenter, ou pour persécuter de pauvres animaux qui ne leur font ni tort ni dommage."
Il tira son couteau et coupa les cordelettes. Le hibou prit l'essor ; mais, revenant à tire d'aile : "Avenant, dit-il, il n'est pas nécessaire que je vous fasse une longue harangue pour vous faire comprendre l'obligation que je vous ai ; elle parle d'elle-même : les chasseurs allaient venir, j'étais pris, j'étais mort sans votre secours ; j'ai le coeur reconnaissant, je vous le revaudrai."
Voilà les trois plus considérables aventures qui arrivèrent à Avenant dans son voyage. Il était si pressé d'arriver, qu'il ne tarda pas à se rendre au palais de la Belle aux Cheveux d'Or.
Tout y était admirable ; l'on y voyait les diamants entassés comme des pierres ; les beaux habits, le bonbon, l'argent ; c'étaient des choses merveilleuses ; et il pensait en lui-même que, si elle quittait tout cela pour venir chez le roi son maître, il faudrait qu'il jouât bien de bonheur. Il prit un habit de brocart, des plumes incarnates et blanches ; il se peignit, se poudra, se lava le visage , il mit une riche écharpe toute brodée à son cou, avec un petit panier, et dedans un beau petit chien, qu'il avait acheté en passant à Bologne. Avenant était si bien fait, si aimable, il faisait toute chose avec tant de grâce, que lorsqu'il se présenta à la porte du palais, tous les gardes lui firent une grande révérence ; et l'on courut dire à la Belle aux Cheveux d'Or qu'Avenant, ambassadeur du roi son plus proche voisin, demandait à le voir. Sur ce nom d'Avenant, la princesse dit : "Cela me porte bonne signification ; je gagerais qu'il est joli et qu'il plaît à tout le monde.
- Vraiment oui, madame, lui dirent toutes les filles d'honneur : nous l'avons vu du grenier où nous accommodions votre filasse, et tant qu'il a demeuré sous les fenêtres nous n'avons pu rien faire.
- Voilà qui est beau, répliqua la Belle aux Cheveux d'Or, de vous amuser à regarder les garçons ! Ca, que l'on me donne ma grande robe de satin bleu brodée, et que l'on éparpille bien mes blonds cheveux ; que l'on me fasse des guirlandes de fleurs nouvelles ; que l'onme donne mes souliers hauts et mon éventail ; que l'on balaye ma chambre et mon trône : car je veux qu'il dise partout que je suis vraiment la Belle aux Cheveux d'Or.

A suivre...

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