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Des contes et légendes
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10 décembre 2006

La ronde des fées (suite)

Cette inspection fut assez longue, trop longue au gré des intéressées, et elle touchait à sa fin quand, s'arrêtant devant Christine, le noble personnage fut frappé du cachet de distinction qu'il croyait remarquer chez elle, - affaire d'impression personnelle, que voulez-vous ? - et il n'hésita pas à lui tendre gracieusement la main, à la prendre à son bras et à la présenter aux dames patronnesses. Humiliante déconvenue, mortifiante déception pour toutes ces coquettes. Mettez-vous à la place de Christine, et dites si vous auriez levé la tête avec moins d'orgueil, et si vous auriez transpercé vos rivales d'un regard moins vengeur !
Oui mais, attendez la fin... Amies lectrices et aussi peut-être lecteurs, je vous mets au défi de deviner comment se termina l'aventure de celle dont le prince avait fait choix et dont il paraissait si fier. Eh, bien écoutez donc, ou plutôt lisez la suite.
En présentant sa protégée aux dames du concours, le royal convive leur dit avec une profonde révérence : "Voici, mesdames, la jeune et ravissante personne que je soumet avec confiance à votre impartial jugement, et je ne doute pas que, dans un accord unanime et spontané, vous ne portiez sur elle tous vos suffrages !..."
Ah ! malheur ! ô prodige incompréhensible autant que soudain ! à peine a-t-il dit, qu'à la place de la belle jeune fille qu'il admirait si complaisamment, ne se trouve plus qu'une hideuse créature dont la seule vue le fait reculer d'horreur. Par l'effet d'une abominable métamorphose, l'infortunée Christine voit tous les riches vêtements et les ornements fastueux qu'elle avait acquis à la ronde des fées, se transformer en d'affreuses guenilles qu'un chiffonnier n'eût pas touchées du bout de son crochet. Sa brillante robe de soie moirée, ce n'était plus qu'un sac à pommes de terre : son beau châle tapis à grands ramages, ce n'était plus qu'une toile d'emballage toute plaquée de graisse et de boue ; sa mignonne chaussure, une grossière paire de sabots garnis de foin ; son élégante coiffure, un capuchon de paille d'avoine dont les épis lui tombaient dans le dos ; sa rivière de diamants, un ignoble collier de colimaçons, et son aristocratique petite montre, une rondelle de carotte suspendue à une corde de chanvre !... Vous dire le saisissement et la stupeur que cette transformation produisit dans l'assemblée, les éclats de rire moqueur qu'elle provoqua, la honte et la douleur dont fut accablée la pauvre Christine, en se sauvant à toutes jambes, serait impossible à notre plume. Nous ajoutons seulement que, rentrée dans sa demeure, elle en fit une longue maladie à laquelle elle attribua la perte de ses cheveux, de ses dents et son beau teint.
De nombreux jours se sont écoulés, et un nouveau clair de pleine lune resplendit sur la prairie. Au beau milieu de ce champ émaillé de fleurs de tous genres, les jeunes fées poursuivent leur ronde infatigable et chantent, avec accompagnement de rires éclatants, de contorsions et de sauts les plus expressifs, les cruelles mystifications qu'elles affligent aux honteuses passions et aux travers ridicules des mortels. Tout à coup se dégage des buissons une forme humaine que de loin on prendrait pour une évocation magique ou pour un spectre errant dans un cimetière.

http://nilemerald.canalblog.com

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